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La XXVème heure
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24 janvier 2016

Les passants de Lisbonne, Philippe Besson

besson

Sans doute Philippe Besson prit sa plume pour se confronter, dans "Les passants de Lisbonne", à la pensée d'Hugo; "L'enfer, c'est l'absence éternelle"! Explorant le labyrinthe des âmes confrontées aux disparus, l'auteur entrelace les destins de deux inconnus qui s'abandonneront l'un à l'autre pour trouver le layon de la renaissance. 

L'histoire? Celle d'Hélène et de Mathieu. L'une a vu son mari disparaître dans un dévastateur tremblement de terre; l'autre, a trouvé un jour dans un appartement vide une lettre de rupture. Chacun débarque à Lisbonne en quête d'un deuil. Elle demeure atone, introspective. Il se perd dans les plaisirs éphémères de la nuit. Ils vont se reconnaître, ou de moins leur tristesse. Ils vont se livrer, se confesser... Et dans ce dialogue, évoluer vers des terres fertiles.

L'écriture se fait délicate, cristalline, musicale, pour creuser sous une fausse légèreté la profondeur du désespoir. Fildefériste de l'intime, Philippe Besson révèle au coeur d'un duo chambriste, les secrets d'une symphonie.  

Vous accordez de l'importance aux détails insignifiants. Là se dissimulent les vérités?

"Absolument! Les détails ne sont jamais insignifiants. Ce qui nous apparaît comme secondaire révèle souvent ce que nous sommes. Comme un murmure en dit plus long qu'un cri".

N'est-ce pas surtout car le diable se cache dans les détails?

besson1

"Mmmmmh. Allez savoir! On déploie beaucoup d'efforts à masquer sa vraie personnalité. Je tente de comprendre ce qu'il y a au-delà du jeu des apparences."

C'est l'essence de votre l'écriture...

"J'aime explorer ces silences, l'infiniment petit. Ce lieu où se trouvent les clés nécessaires à la compréhension des êtres et... du monde. Dans mes livres, je cherche à donner une résonance universelle aux chagrins intimes".

Hélène et Mathieu vont se livrer sans retenue. Ne peut-on s'abandonner qu'à l'inconnu?

"L'étranger ne nous regarde pas au travers du prisme du passé. Cet inconnu a une fonction de journal intime. On peut lui dire ce que nous aurions écrit dans nos silences. Pour Hélène, Mathieu représente aussi une confession, un exutoire, la possibilité de sortir du déni".

Aime-t-on l'autre pour ce qu'il est ou pour l'image qu'il renvoie de nous?

"Ce serait bien d'être aimé pour soi. Encore faut-il pouvoir se montrer sans travestissement. Difficile! On veut plaire, séduire, on manque de confiance en nous... Dès lors, on cherche souvent un regard rassurant et, par là-même, on fausse les règles du jeu".

Séduire, est-ce mentir?

"Jouer un rôle n'est pas séduire. Avancer caché, c'est une victoire à court terme. La question est: veut-on gagner ou garder quelqu'un?"

Quelle différence entre l'amour et l'amitié?

"L'insécurité! L'amour est tout sauf ... confortable".

Le hasard traverse votre oeuvre. Eluard écrivait qu'il n'existe pas, qu'il y a des rendez-vous. Partagez-vous cette vision?

"Je crois aux rencontres. Souvent, elles ne dépendent pas de notre volonté mais de ce que nous sommes au moment où elles se produisent. Ma vie est jalonnée de rencontres décisives. Et puis il y a ceux qui ont disparu. Qu'aurait été notre vie, s'ils étaient toujours présents? Question obsédante..."

A l'instar, d'Hélène?

"Un être qui sans va, c'est une part de nous qui s'éteint. Forcément, notre regard sur les choses, la vie et la façon de l'abordée, s'en trouve changé".

Mathieu pense que le veuvage est pire que la séparation. N'est-ce pas l'inverse?

"La séparation est cruelle car elle ne permet pas de faire son deuil. L'autre demeure accessible. On le sait là, quelque part. Il nous nargue en quelque sorte. Pas le défunt".

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Mathieu est persuadé qu'être heureux n'est possible qu'une seule fois. Hélène va tenter de lui prouver l'inverse...

"Même si l'on ne guérit jamais de ses amours perdus, on peut connaître d'autres bonheurs empreints de textures nouvelles".

C'est la conclusion de votre roman. Mais en êtes-vous convaincu?

"Je voulais qu'on reste dans l'indéfinissable d'une relation. Ce qui unit Hélène et Mathieu ne peut être répertorié dans une case. C'est une relation suspendue. Hélène va faire son deuil et revenir parmi les vivants. Mathieu retrouvera l'amour..."

Peut-on recommencer un amour?

"C'est une question permanente: nous n'avons pas réussi la première fois, fera-t-on mieux la seconde?"

Et Philippe Besson de nous laisser à notre intime inclinaison...

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Commentaires
A
Voilà une chronique bien engageante qui donne envie de lire le roman! Félicitations, Apolline Elter
La XXVème heure
  • La lecture n'est pas une confusion entre fiction et réalité, une humiliation du réel. Lire n'est pas une activité séparée en concurrence avec la vie. Au contraire! Elle donne forme, saveur, style et même élégance à l'existence...
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