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La XXVème heure
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16 juin 2012

La chambre des vies oubliées, Stella Duffy

duffy1

J'avoue, ignorant que j'étais, je  ne connaissais pas cet incroyable roman "La chambre des vies oubliées" et encore moins Stella Duffy que je confondais avec une vague chanteuse.... Le mal est réparé. Et quelle découverte! Des gens ordinaires, au coeur d'un roman choral, qui cachent des secrets extraordinaires. C'est le London du brassage des cultures, celui au-delà de la Tamise, celui aux couleurs de la diversité mais dont on parle trop peu...

Dans un quartier pauvre du sud de Londres, après quarante ans de labeur derrière le comptoir de son pressing et dans les vapeurs d'étuve, Robert Sutton veut passer la main. Il a lancé une annonce et attend le futur repreneur.

C'est un jeune Anglais d'origine pakistanaise et musulman qui se présente. Un peu timide mais déterminé, Akee rayonne d'une ambition modeste et bienvenue. Méfiant, Robert le met à l'essai pendant plusieurs mois, le jauge, le juge et se détend lentement.

Peu à peu, les deux hommes, aux passés et aux caractères si contrastés, commencent à s'apprécier sans se l'avouer. Avare de mots, Robert affecte d'être perpétuellement bougon, grommelant, mais ne néglige pas d'enseigner à son probable successeur les tours de main de son métier, ni de détailler la configuration sociologique de ce quartier qui défile devant la vitrine et finit par pousser la porte pour demander, en toute hâte, qu'on nettoie ses effets.

Carrousel de personnages dont Stella Duffy nous fait partager les tourments et les bonheurs. Dans ce magnifique

duffy

roman choral, le lecteur suit chacun d'entre eux, à différents moments: une jeune fille au pair amoureuse de l'homme de la maison, deux néo-clochards que la crise a échoués sur un canapé défoncé en pleine rue, un poète jamaïcain, un délinquant poursuivi par ses démons, une vieille dame frappée d'Alzheimer, un homosexuel sans attaches, des amoureux comme des ombres.

En toile de fond, un autre personnage se détache et les englobe tous: la ville de Londres, sa topographie, son architecture, son réseau de trains, de bus, de métros, ses ponts, Big Ben, Saint-Paul, les parcs verdoyants et les voyages quotidiens d'une humanité en perpétuelle transhumance dans cette capitale où tout un peuple mélangé se côtoie sans se connaître, pousse sa roue sans voir au-delà du sillon qu'il trace obstinément.

Le beau titre de ce livre renvoie à la pièce où Robert remise tous les papiers, factures, discours de mariage, listes de courses, clefs que les clients ont abandonnés dans leurs poches et qu'il a méticuleusement classés au cas où. Mais ce secret dont il s'ouvre à l'impétrant demeure le moins douloureux à révéler.

Akee habite à l'autre bout de la ville dans un autre univers; Robert vit à l'étage au-dessus de son magasin, dans un appartement qu'il a longtemps partagé avec sa mère Alice, sa femme Jean et leur fille Katie. Il y a vingt-cinq ans, quelques mois après la mort d'Alice, Jean et Katie sont parties, pour des raisons qui ne seront dévoilées qu'à la fin du roman sans que le lecteur les ait envisagées.

Stella Duffy arrive du polar. Elle sait admirablement ménager ses effets, maîtrise l'art de distiller des indices, mine de rien, de donner quelques informations éparses. Elle excelle aussi à entraîner le lecteur dans le décor et la psychologie de ce qui constitue la trame et la saveur d'un quartier. Ou les différentes facettes d'un kaléidoscope que l'on appelle l'humanité.

(La croix)

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Commentaires
C
D'accord, 'La Chambre' est un superbe roman servi par une très bonne traduction. Mais Stella Duffy ne vient pas du polar. Sa série des Saz Martin a été publiée comme telle parce qu'il y a des morts mais un mort ne fait pas un polar. De plus son héroïne est trop intéressée par les choses de la chaîre pour en faire une enquêtrice sérieuse. Les 'polars' de Stella Duffy sont plus de délirantes pochades, certes aussi excellentes!
La XXVème heure
  • La lecture n'est pas une confusion entre fiction et réalité, une humiliation du réel. Lire n'est pas une activité séparée en concurrence avec la vie. Au contraire! Elle donne forme, saveur, style et même élégance à l'existence...
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